Endométriose : "Les douleurs devenaient atroces, j'ai dû me faire enlever l'utérus"

Endométriose : "Les douleurs devenaient atroces, j'ai dû me faire enlever l'utérus"

Par Léa Giandomenico Publié leActu Voir mon actu

Douleurs aigües dans le bas ventre, douleurs sciatiques, maux de tête, problèmes urinaires et digestifs… Au quotidien, l’endométriose peut devenir une maladie très invalidante pour certaines femmes. Pourtant, aucun remède n’existe encore.

Alors comment vivre avec cette maladie ? Des femmes se sont confiées à actu.fr.

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« On me disait que j’étais une chochotte »

Pour de nombreuses femmes, l’histoire commence de la même façon : avec les premières règles… et les douleurs au ventre qui les accompagnent.

Gül, 39 ans, est atteinte d’endométriose sévère depuis ses 9 ans. Alors qu’elle a des douleurs chroniques et multiples, son diagnostic n’est posé qu’à l’âge de 25 ans, après des années d’errance médicale.

« Les douleurs ont commencé avec mes premières règles. J’étais pliée en deux chaque mois, j’avais des pertes de sang énormes, je ratais l’école… je me rendais très fréquemment à l’hôpital et on me disait que j’étais une chochotte, que toutes les femmes avaient leurs règles », se remémore cette habitante de la région parisienne.

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« Je perdais très souvent connaissance »

Même son de cloche pour Cindy, 31 ans, atteinte d’endométriose depuis l’âge de 11 ans. « Avec mes premières règles, j’ai eu immédiatement des douleurs intenses et des règles très abondantes », nous raconte-t-elle.

Pour elle comme pour Gül, les médecins n’ont jamais fait le lien entre ces règles très douloureuses et l’endométriose. « On me disait que c’était normal, que si je m’évanouissais, c’était parce que je faisais des chutes de tensions, que j’avais une petite santé », se rappelle Cindy.

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Des douleurs multiples

Mais pour de nombreuses femmes, les douleurs ne s’arrêtent pas aux maux de ventre et aux règles douloureuses. Gül, par exemple, a de gros problèmes intestinaux, des douleurs au dos et l’épaule gauche, et des maux de tête réguliers.

« Un jour, j’ai fait une hémorragie interne, à 25 ans. C’est à ce moment-là qu’on m’a dit que ça pouvait être de l’endométriose. Il a fallu que je fasse une hémorragie interne pour qu’on me diagnostique ! », ironise-t-elle.

Cindy, quant à elle, à des douleurs sciatiques, qui lui paralysent le bas du corps, de la fesse droite jusqu’à l’orteil. Enfin, elle a des douleurs urinaires régulières. « Si j’ai envie d’aller aux toilettes et que je me retiens pendant quelque temps, j’ai des douleurs très aigües », explique-t-elle.

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Errance médicale

Endométriose :

De ses 19 à ses 25 ans, Cindy navigue entre quatre gynécologues différents, qui lui servent tous le même discours : toutes les femmes ont mal durant leurs règles, elle doit serrer les dents et arrêter de se plaindre. Ce n’est qu’à 27 ans qu’elle est diagnostiquée, grâce à une IRM.

Pourtant, plus on prend du retard dans le diagnostic, plus la maladie et les douleurs s’installent, plus il est compliqué de traiter les patientes. Et le problème de Gül, c’est que la maladie est déjà bien installée. On lui propose alors une opération, qui se déroule très mal.

« La chirurgienne qui m’a opérée ne connaissait rien à la maladie, comme beaucoup d’autres médecins à l’époque d’ailleurs. L’endomètre s’était répandu au niveau de certains de mes organes, elle n’aurait dû toucher à rien. Mais elle a gratté partout », poursuit Gül.

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Mieux former les professionnels

Après ça, les opérations s’enchaînent encore. « Je ne saurais même plus les compter… Maintenant, comme ma vessie ne fonctionne plus, je dois me sonder. Parfois je ne peux plus marcher car mon nerf sciatique est atteint. J’ai toujours des douleurs très régulières. Alors oui, améliorer la formation des médecins, des radiologues, des infirmières, c’est capital« , argue-t-elle.

Une quinzaine de cœlioscopies

Elizabeth, 66 ans, a des problèmes gynécologiques dès l’adolescence : des règles très douloureuses et des pertes de sang très abondantes. Rapidement, on l’envoie à Paris pour une intervention, et on détecte son endométriose vers 18 ans.

« Après ça, on m’a fait des cœlioscopies – des interventions chirurgicales qui permettent d’accéder à l’intérieur de l’abdomen – pour « gratter » cette muqueuse qui attaquait mes organes. Mais rien n’y faisait, la douleur revenait toujours », explique cette habitante du Havre.

En tout, elle subira une quinzaine de cœlioscopies jusqu’à ses 40 ans, à Paris. « C’était des opérations très douloureuses, c’était dur… », se remémore-t-elle.

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Neuf pilules différentes

Si on ne propose pas d’opération à Cindy, on la met toutefois sous pilule qui provoque une aménorrhée, et donc un arrêt de la cause des douleurs. « En quatre ans, j’ai testé neuf pilules différentes avec des dosages divers. Et je n’ai toujours pas trouvé la solution miracle, mes douleurs finissent par revenir », souffle celle qui est aussi bénévole dans l’association EndoFrance.

Cette habitante de Champagne-Ardenne essaie alors la médecine douce : ostéopathie, alimentation spécifique. Mais rien n’est vraiment miraculeux. Sans compter que « ça engendre des frais », poursuit-elle, « entre les séances d’osthéo non prises en charge, et les plaquettes de pilule non remboursées, à 60 euros le mois, ça devient parfois compliqué… »

Et ces changements de pilule répétés font prendre à Cindy 20 kilos. « Ça, ça a été vraiment dur, ça a eu un gros impact sur ma confiance en moi. Il faut déjà accepter la maladie, et en plus son image dans le miroir », se désole-t-elle.

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« On m’a dit que je ne pourrais jamais avoir d’enfant »

Elizabeth est aussi placée sous pilule, mais rapidement elle souhaite avoir un enfant. « On me disait que ça ne serait pas possible, que jamais je ne pourrais avoir d’enfant. Pourtant j’ai eu un fils, un miracle ! », raconte cette soixantenaire.

Après ça, on lui propose l’hystérectomie. Autrement dit, lui enlever l’utérus. « Les médecins me disaient que c’était la seule option. Mais moi je voulais un deuxième enfant, alors je repoussais cette solution. »

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Une « charge énorme » dans la vie professionnelle

Si la maladie impacte la vie de ces femmes au quotidien, dans leur rapport à leur corps et à la douleur, elle joue également sur leur vie professionnelle. Depuis son opération, Gül est reconnue comme travailleuse handicapée. Elle a dû quitter son job d’éducatrice spécialisée et travaille désormais dans l’administratif.

« Je l’avoue, je ne suis pas la plus comblée du monde, professionnellement. Avant, mon travail, c’était ma vie. Maintenant je suis à temps partiel, je dois sans cesse me justifier auprès de mes collègues quand j’ai des douleurs, c’est une charge énorme« , souffle la trentenaire.

La maladie a aussi beaucoup joué sur la qualité de travail de Cindy, qui avait du mal à rester debout à cause de ses douleurs sciatiques. Et pour elle, certains emplois sont exclus : elle doit pouvoir aller aux toilettes quand elle le veut.

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Pour Elizabeth, concilier l’endométriose et son travail d’infirmière de nuit, « c’était dur à gérer. Avec ces règles très abondantes, je devais sans cesse me changer. Et puis mon travail était physique, et moi j’étais fatiguée, parfois faible », raconte-t-elle.

« Socialement, ça reste compliqué »

Au quotidien, la maladie mène la vie dure à ces femmes. « Socialement c’est compliqué. Quand je prévois de sortir avec des amis, j’annule trop souvent au dernier moment parce que je fais une crise. Et je me sens incomprise », explique Gül, qui est désormais référente pour EndoFrance en Île-de-France.

Dorénavant, la plupart des gens a déjà entendu parler d’endométriose, le sujet est moins tabou. « J’ai la chance d’avoir un cercle d’amies très compréhensif, et d’avoir un conjoint très bienveillant par rapport à ça. Je suis bien entourée », argue Cindy.

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Pourtant, ces femmes tirent le même enseignement : il faut continuer à mieux former les professionnels de santé sur ce sujet. Et Cindy de conclure : « Si l’infirmière de mon collège avait su ce qu’était l’endométriose quand j’allais la voir fréquemment pour des douleurs de règles, ça m’aurait peut-être évité des années d’errance ».

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