Témoignage : J’ai subi 4 fausses couches - Magicmaman.com

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Par Marine Chassang FilipeMis à jour le PartagerEnvoyer par e-mail
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Je certifie ne pas envoyer d'e-mail indésirableNathalie, 38 ans, est la maman d’un petit garçon de 3 ans et demi. Depuis qu’elle essaie d’avoir un deuxième enfant, elle a déjà subi 4 fausses couches. Elle partage son histoire pour lever le voile sur ces moments douloureux que vivent aujourd’hui de nombreuses femmes en silence.

« Mon premier garçon, très attendu, est arrivé comme un cadeau du ciel en cette belle journée de septembre 2017. Avec son papa, très vite, on a eu envie de lui donner un petit frère ou une petite sœur. C’est vrai que j’ai toujours voulu avoir une grande famille.

Je tombe enceinte en janvier 2019, mon fils a à peine plus d’un an. Je suis heureuse et nauséeuse. La première écho arrive, je suis allongée sur la table quand j’entends : « J’ai une mauvaise nouvelle. » Je pense instantanément à un handicap, mais pas une seule seconde qu’il n’y a plus de bébé. Une phrase que m’avait dite mon gynéco au début de ma première grossesse me revient : « On ne s’emballe pas. » Bien sûr que si, c’est merveilleux d’être enceinte. « Le cœur du bébé s’est arrêté. » À ce moment précis, je sais que je ne m’emballerai plus jamais.

Un curetage en maternité

À la seconde où je l’apprends, je ne veux plus qu’une chose : qu’on me l’enlève, qu’il sorte de mon corps alors que cinq minutes avant, dans la salle d’attente, je me rêvais avec lui. Un curetage en clinique sous anesthésie générale est programmé le lendemain. « Vous souhaitez allaiter ? », ces mots me réveillent après l’opération, une infirmière s’adresse à une jeune femme à mes côtés. Je me demande si elle a accouché par césarienne, il n’y a pas de bébé.

Je tombe de nouveau enceinte en décembre 2019. Je suis contente, j’y crois mais quelques jours après, j’ai des crampes au ventre et des saignements. Les jours passent, la douleur s’accentue. Au fond de moi, je sais ce que c’est, même si je me persuade du contraire. L’échographie révèle que l’embryon est mort. Le médecin le retire à la main, en même temps que mes douleurs.

Payer pour expulser son bébé

J’active le mode « je m’accroche même si je n’y crois plus », je change de gynéco. On m’en conseille un, réputé pour aider les femmes à tomber enceintes. Commence alors toute une batterie d’examens qui ne révèlent rien d’anormal. J’aurais préféré le contraire, pour trouver une solution à mon problème. Je tombe enceinte en septembre 2020 et je touche d’un peu plus près l’espoir de devenir une deuxième fois maman. J’ai peu de souvenirs de cette période… J’apprends très vite qu’il s’agit d’un œuf clair. Le médecin me donne un comprimé et un verre d’eau, puis me prescrit un autre médicament à récupérer en pharmacie pour « m’aider » à expulser l’embryon. Je sors du cabinet avec mes larmes et mon ordonnance. La pharmacienne me réclame son dû et me précise, mal à l’aise, que ce médicament n’est pas remboursé. Je suis sous le choc. Pas pour le montant, juste pour le principe. Je paie pour faire sortir mon bébé de mon corps. C’est juste fou.

Enceinte mais pas heureuse

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J’ai maintenant deux options : soit je me morfonds, soit je me reprends et je fais tout ce qui est en mon pouvoir pour avoir ce bébé. Je suis une battante, je choisis la deuxième et tombe enceinte deux mois plus tard. Comme pour chaque grossesse, j’ai des symptômes, moi qui ne veux plus me projeter... OK, et après ? Tomber enceinte n’est plus un problème pour moi. « Au moins ça marche, tu n’es pas stérile ! », me répète-t-on. Je le sais mais je n’en suis plus là. Je ne suis pas heureuse de cette cinquième grossesse, j’ai juste peur. Je ne l’annonce même pas à ma mère. Je parle à mon bébé pour lui demander de s’accrocher, pour qu’il sache que je suis une bonne maman, mais je ne suis pas sereine. Le gynécologue suspecte une grossesse extra-utérine. J’apprends aux urgences qu’il ne s’agit pas d’une GEU, mais le sac gestationnel est tout de même petit par rapport au stade de la grossesse et mes antécédents ne présagent rien de bon. Je prie de toutes mes forces, mon médecin voit bien l’embryon mais doute de sa taille. « On se revoit dans une semaine ». Sept jours affreux. On y retourne, il nous fait écouter son cœur mais… « Il n’a pas grandi, il ne va pas tenir ». Je suis à 10 semaines d’aménorrhée. Je ne veux pas de curetage, il me prescrit les fameux cachets. Je les prends en cette matinée du 7 janvier avec, en fond, la chanson « Nous » de Julien Doré. Deux heures après, je saigne et le soir même, je hurle.

Les saignements continuent plusieurs jours. Une échographie révèle « des débris », le médecin les retire, mais ça ne s’arrête pas. Après trois semaines, sur le chemin de l’école, je sens que je me vide complètement. Il y a du sang partout, je suis traumatisée, mon fils est à côté. Direction les urgences, on me demande quand j’ai accouché. C’est une hémorragie. Mon corps me lâchait petit à petit, il vient de s’écrouler. La question d’un curetage se pose. À la place, je reçois une transfusion sanguine et je suis hospitalisée 48 heures au sein d’une maternité... Dans la chambre, la petite baignoire et la table à langer me rappellent que je n’ai pas eu de bébé. La nuit, j’entends ceux des voisines pleurer…

Cette quatrième fausse couche est la plus violente et c’est aussi celle qui m’a donné envie de crier ma détresse au monde entier, et plus seulement à mes proches. Aujourd’hui, je ne baisse pas les bras, même si je sais que je ne vivrai plus jamais une grossesse sereine. Je suis triste car il manque quelque chose à ma vie. La souffrance de mon mari est peu visible mais bien réelle aussi. Il veut rester un soutien sur lequel m’appuyer. Mon corps est épuisé, j’ai décidé de plus l’écouter. C’est lui qui a le contrôle.

Lever le voile sur la fausse couche

Il faut avoir vécu la fausse couche pour la comprendre. Plus qu’une douleur, c’est un combat à mener vis-à-vis de la société qui en fait un tabou. Il n’y a aucune honte à perdre un enfant. En ce moment même, je préférerais un gros câlin plutôt qu’on me dise « la nature est bien faite, ton bébé n’était pas viable », « sois contente, t’as déjà un enfant », ou encore « ce n’était pas vraiment un bébé », y compris de la part des soignants qui font de la fausse couche quelque chose de banal sans considérer celle qui la subit. Un mouvement s’est créé autour du postpartum qui n’est pas facile à vivre, il faudrait faire pareil avec les fausses couches. Que la société se mobilise pour que les femmes qui vivent ce drame sachent qu’elles ne sont pas seules, que ce n’est pas de leur faute, qu’elles ont le droit d’avoir mal, pour qu’elles n’aient pas à se retrouver dans une maternité entourées de jeunes mamans, pour qu’un suivi psychologique ne soit plus une option. Ce n’est pas parce qu’elle ne se voit pas que la douleur n’est pas profonde. »

Fausse-couche : pour vous aider

L'association Agapa propose accueil, écoute et soutien à la suite de la mort d’un bébé autour de la naissance ou d’une grossesse qui n’a pu être menée à terme. association-agapa.fr

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