Carrelage : attention à la rénovation hors réglementation

Carrelage : attention à la rénovation hors réglementation

Batirama.com 06/09/20184

Les évolutions industrielles des carreaux céramiques n’épargnent pas la rénovation. Certaines ne sont pas prises en compte par les règles de l’art. Il faut redoubler de vigilance au moment de la préparation des supports.

Comme toujours, les industriels du monde de la céramique poussent à l’innovation. « L’esthétique du carrelage a changé et se diversifie tant d’un point de vue des formats que des produits », informe Sabrina Vadrot, chef de produit pose de carrelage chez Saint-Gobain Weber France.

La tendance ? « Des formats 60 x 60 cm et plus, minces et oblongs, ainsi que des grès cérame haut de gamme ». Seul souci : « Officiellement en rénovation, on ne peut pas poser de carrelage au sol au-delà de 3 600 cm2 », rappelle Christine Peltier du service technique de Sika. « Il convient alors d'expliquer aux particuliers les contraintes des grands modules »

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Impossible alors de répondre aux demandes de ses clients ? « À partir du moment où un grand format est collé sur un autre existant, les fabricants de produits de mise en œuvre demandent de prévoir un ragréage au préalable pour s'assurer d'une parfaite étanchéité et sécuriser le plan de collage ». Et bien sûr, « de réceptionner les supports dans les règles de l’art », abonde Alexandrine Gerbier, chef de produits colles et joints chez Mapei. Un incontournable pour éviter les désagréments. Mais ce n’est pas le seul.

Vigilance sur les supports

« Coller un nouveau revêtement sur un ancien carrelage ne pose aucun souci, même si le carrelage devait présenter des microfissures. Mais, en revanche, il ne faut pas qu’il sonne creux », alerte Christine Peltier. Même avertissement chez Mapei, « quand une carreau sonne creux, il faut impérativement l'enlever et reboucher l'espace laissé vide », continue Alexandrine Gerbier.

En outre, un ancien carrelage doit être « très bien nettoyé, reprend la coordinatrice technique de Sika. Il faut impérativement réaliser un lessivage sodé, le laisser agir puis rincer. Les carreaux polis appellent aussi à une certaine vigilance. Ils ont des tensions superficielles très sévères. Il faut donc poncer cette surface ».

Reste que confrontées à ces nouvelles techniques de pose, des chantiers de plus en plus variés, « et des clients finaux aux exigences affirmées, les entreprises doivent faire preuve d’adaptabilité et d’agilité en développant une qualité d’écoute et de conseils, et une véritable approche commerciale », informe la responsable de Saint-Gobain Weber France.

Confort toujours amélioré

Carrelage : attention à la rénovation hors réglementation

Du côté des fabricants de PMO, on mise sur la facilité et le confort de pose. La polyvalence est de mise. « Dans certains cas, il est possible de s’affranchir de primaire. D’autres solutions développées apportent un meilleur rendement pour l’applicateur, permettant par exemple de réaliser la même surface avec 15 kg de produit qu’avec 25 kg », ajoute Alexandrine Gerbier.

Après l’anti-poussière poussé par Parex Lanko il y a maintenant quelques décennies, puis les versions allégées, « nous continuons à nous engager pour le bien-être et la santé de nos clients », informe Sabrina Vadrot. « Nous développons des PMO avec plus d’onctuosité, plus facilitants, et à faibles impacts environnementaux ». Une dimension toute aussi inévitable pour répondre aux attentes des entreprises comme celles des clients particuliers.

SOLUTION 1 : Cas d’un ancien revêtement conservé

La pose en rénovation sur carrelage existant, dalles semi-flexibles et revêtements PVC homogènes en lés, ancienne peinture, ou ancien sol en résines coulées est visée par le Cahier des prescriptions techniques (CPT) sols P3–Rénovation, cahier 3529_V4 de novembre de 2012*.

©Photo Weber

Attention, ces carrelages destinés à devenir un nouveau revêtement aujourd’hui sont confrontés à deux nouvelles tendances. Tout d’abord, celles de formats supérieurs à 3 600 cm2 hors réglementation.

S’il y a certes incompatibilité réglementaire puisque cette mise en œuvre n’est pas visée par un Cahier des prescriptions techniques, cette pose est possible à condition de prévoir un ragréage intermédiaire. Même si ces carreaux grands modules ne font que 6 mm d’épaisseur, il faut également faire attention à la hauteur du sandwich.

L’autre grande tendance : vouloir coller un nouveau carrelage sur des bétons cirés qui après des années de plébiscite chez les particuliers font moins l’objet d’engouement. Attention ce type desurface bloque l’adhérence des produits de mise en œuvre (PMO). La pose de carrelage n’est donc pas envisageable, à moins de tout déposer.

Avantages : moins onéreux et plus rapide qu’une dépose totale de l’ancien revêtement

Limites : attention aux hauteurs obtenues en conservant un ancien revêtement, en particulier s’il faut ragréer.

*http://evaluation.cstb.fr/fr/rechercher/

SOLUTION 2 : Cas d’un ancien support en bois

La pose de carrelage sur plancher bois est très courante, et elle aussi visée par le CPT 3529_V4.

©Photo Veka

Si le support n’est pas un plancher flexible à la marche, ni sur lambourdes ou sur solivages, sur dallage ou vide sanitaire, le carrelage se colle à condition de prévoir un primaire adapté et un ragréage fibré. Mais attention, normalement la dimension des carreaux est limitée à 33 x 33 cm.

Pour aller au-delà, il faut désolidariser au-dessus du ragréage fibré. S’il s’agit d’une rénovation et que le plancher est un panneau de bois type hydrofugé CTBH ou OSB – rarement CTBX beaucoup trop onéreux -, la pose sera identique à un plancher bois conservé.

Autre possibilité : s’affranchir du ragréage fibré en posant directement sur une natte de désolidarisation qui a une double fonction, puisqu’elles peuvent aussi faire office de Système de protection à l’eau sous carrelage (SPEC). Une option intéressante notamment en rénovation de salle de bains où ce procédé est préconisé par les règles de l’art.

Avantages : mise en œuvre courante visée par le CPT pose collée de carrelage en rénovation.

Limites : nécessite un repérage minutieux, par pièce, des affaissements, lames manquantes ou mal fixées, des joints entre lames ou entre panneaux.

SOLUTION 3 : Pose sur un ancien support chauffé par le sol

L’ancien carrelage abrite un plancher chauffant ? Il est tout à fait possible d’apporter un coup de fraicheur grâce à la mise en œuvre d’un nouveau carrelage.

©Photo Edilteco

Il ne sera pas question de venir coller ce revêtement, si le plancher chauffant est électrique. En outre, avant d’intervenir, le plancher chauffant ou à eau basse température aura été arrêté au moins 48 heures pour rendre la température ambiante au support.

De même, étant donné que le nouveau carrelage va ajouter de l’épaisseur, il faut bien sûr prévoir la hauteur du sandwich, et penser à la mise en chauffe qui va être légèrement plus longue. Une fois ces précautions intégrées, une pose en rénovation s’envisage tout à fait au moyen de mortier-colle spécial plancher chauffant. En outre, prévoir une natte de désolidarisation autorise la pose d’un nouveau carrelage même sur un sol fissuré qui recouvre un plancher chauffant.

Avantages : gain de temps, opération moins coûteuse, immobilisation réduite des locaux à rénover.

Limite : mise en œuvre impossible avec un plancher chauffant électrique.

AVIS EXPERT

Nadège Ombé, secrétaire général de l’Union nationale des entrepreneurs de carrelage du bâtiment (UNECB-FFB).

« La pose à joint nuls ne sera pas visée par les textes »

Bâtirama : Les formats des carreaux ne cessent de s’agrandir. Vont-ils être pris en considération à terme par les textes de référence en rénovation ?

Nadège Ombé : Pour l’instant, les grands formats (3 600 cm2

La pose à joints nuls demandée par les clients va-t-elle aussi être prise en considération par la réglementation ?

Nadège Ombé : Effectivement, de plus en plus de clients souhaitent un carrelage avec une pose bord à bord pour des questions d’esthétique. La pose à joint nul ne sera pas visée par les textes car l'expérience montre qu'elle conduit de façon récurrente à des sinistres.

Quelles sont les clés pour une pose de carrelage au sol réussie en rénovation ?

Nadège Ombé : L’idéal reste de déposer complètement le revêtement existant avant d’en coller un nouveau. Mais pour une question de coût, cette solution n’est pas toujours réalisable, orientant plutôt vers une pose sur l’existant. L'une des étapes clés est celle de la reconnaissance du support. À savoir l'analyse du revêtement existant, mais également du support. En outre, lorsqu’on conserve l’existant, il faut le préparer, et rattraper les défauts éventuels.

Quelles seraient vos mises en garde ?

Nadège Ombé : La rénovation des sols peut paraître simple à réaliser, mais les entreprises de carrelage doivent prendre quelques précautions. Le respect des textes de la professions est important pour être couvert par les garanties des contrats de base des assureurs.

Attention à la planéité, car le nouveau carrelage ne rattrapera pas un défaut important sur le revêtement existant. Par ailleurs, le choix des nouveaux carreaux doit être adapté au classement du local. Enfin, il ne faut pas oublier que souvent un artisan intervient dans une maison habitée. Les particuliers apprécient en général les chantiers propres.

Source : batirama.com / Stéphanie Lacaze-Haertelmeyer