Le côté vert du petit-lait Recevez les alertes de dernière heure du Devoir

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Les Québécois aiment leurs fromages. Et les producteurs de la province le leur rendent bien, alliant sans hésitation saveurs du pays et respect de l’environnement. Deuxième de trois textes sur la nature de ces produits d’ici.

Les producteurs québécois se préoccupent de plus en plus de l’empreinte environnementale que génère la préparation de leurs fromages, et ce, en adoptant des stratégies qui limitent le gaspillage et qui revalorisent les sous-produits de leur fabrication.

La production d’un kilo de fromage génère à elle seule jusqu’à neuf litres de petit-lait, aussi appelé lactosérum, ce liquide qui subsiste après la transformation du lait en caillé.

Jusqu’au début des années 1980, « on le jetait, on ne se posait même pas la question », raconte Steve Labrie, le directeur du Centre de recherche en sciences et technologie du lait (STELA) de l’Université Laval. Les choses ont changé depuis : on s’est rendu compte que le lactosérum avait une valeur importante, tant au niveau nutritionnel — il est riche en protéines et en lactose — qu’au niveau de l’empreinte environnementale, fait remarquer le scientifique.

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Le secret des fromages québécois

À l’heure actuelle, une bonne partie du petit-lait va à l’alimentation animale, particulièrement celle des porcs et des veaux. Mais il sert aussi à nourrir des humains : une fois transformé en poudre par des entreprises qui collaborent avec les fromagers, il est incorporé à plusieurs aliments — des pâtisseries, des biscuits, des poudings — pour enrichir leur goût et leur valeur nutritionnelle.

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Le lactosérum est aussi devenu un produit naturel très prisé des sportifs : grâce à l’ultrafiltration, on peut désormais en faire un véritable concentré de protéines, explique Yves Pouliot, professeur à l’Université Laval.

La filière lactose

D’autres entreprises mettent ensuite en valeur le lactose, le sucre du petit-lait. Il sert aux fabricants de lait maternisé, mais aussi à l’industrie pharmaceutique. « Quand on presse les ingrédients d’un médicament dans un comprimé, on utilise souvent du lactose pour coller les particules ensemble. Le lactose a l’avantage d’être inerte : il ne réagit pas avec autre chose », illustre le professeur Pouliot.

Mais le transport du petit-lait de la fromagerie aux lieux de sa transformation reste un grand problème, souligne le spécialiste de la transformation du lait, car la substance brute est composée à 95 % d’eau.

« Cela n’a pas de sens de le transporter tel quel. Pour retirer l’eau, on s’est donc intéressé à l’osmose inverse, un procédé de filtration utilisé dans plusieurs érablières et dans certains systèmes domestiques de purification d’eau. » Le procédé consiste, en gros, à faire passer le petit-lait à travers un filtre qui bloque tout sauf les molécules d’eau. De grandes fromageries ont déjà commencé à le faire et réutilisent l’eau extraite dans l’entretien de leur équipement, souligne le chercheur.

Le concentré de lactose qui en résulte peut ensuite être distillé pour faire de la bière ou des spiritueux. Il peut aussi être converti en biogaz et ainsi offrir une source d’énergie.

Le lactose peut également être transformé en lactulose, une substance qui aide à la digestion et qui est très prisée en Asie.

D’autres défis à relever

Dans un autre ordre d’idées, les chercheurs de l’Université Laval ont aussi développé un logiciel qui pourra aider les producteurs de fromage québécois à utiliser le moins d’eau et d’énergie possible. La question de la pasteurisation du lait reste par contre à résoudre : les systèmes de chauffage à double paroi utilisés à l’heure actuelle requièrent beaucoup d’énergie. C’est donc à la récupération d’énergie et à la recherche d’alternatives au traitement thermique qu’on travaille.

La transformation ne représente toutefois « que de 15 à 18 % de toute l’empreinte environnementale du lait », souligne le professeur Pouliot. « Pour chaque litre de lait, l’empreinte carbone est à 80 % à la ferme : l’alimentation des vaches, le méthane qu’elles libèrent, le fumier qu’elles génèrent… »

Reste que « grâce aux efforts qui ont été faits ces dernières années, le lait québécois figure parmi les meilleurs » à ce chapitre, dit-il.

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